« Nous ne nous tairons pas » : GFM répond fermement à Sonko

« Nous ne nous tairons pas » : GFM répond fermement à Sonko

Sans le nommer, le président de Pastef a demandé à ses partisans de bouder le Groupe futurs médias, estimant que celui-ci combat son parti. Dans son édition de ce vendredi, le quotidien d’information du groupe a répliqué. Nous vous proposons ci-dessous le texte en intégralité.

Il faut appeler les choses par leur nom: hier soir, le Premier ministre Ousmane Sonko n’a pas simplement exprimé un désaccord, il a lancé un appel explicite, péremptoire et dangereusement populiste au boycott du Groupe futurs médias. Ce n’était ni un écart d’humeur, ni une parole de trop. C’était un acte politique calculé. Une stratégie de mise à l’écart. Une entreprise méthodique de discrédit. Ou, selon ses propres mots : une «déclaration de guerre». Dont acte. Et ce n’est nullement un fait isolé.

Depuis plusieurs années, le leader de Pastef s’emploie, avec une opiniâtreté quasi obsessionnelle, à faire plier le Groupe futurs médias.

À nous faire taire. À nous disqualifier. Il érige notre existence en menace, et nous érige, nous, en ennemis à abattre. Son grief ? Nous aurions, selon ses termes martelés avec la régularité d’un mantra, «pactisé» avec ce qu’il désigne, dans un lexique accusatoire savamment huilé, comme le «Système». Il nous. attribue la trahison comme nature, la connivence comme posture, la compromission comme méthode. Le refrain est connu, et d’autant plus lassant qu’il se donne les apparences du courage, alors qu’il n’est bien souvent que l’expression d’un ressentiment mal digéré. A chaque contrariété, un coupable désigné. À chaque critique, une intention perverse prêtée. La mécanique est aussi vieille que les populismes qu’elle recycle : stigmatiser pour mieux régner, essentialiser pour mieux exclure.

Et depuis que le tribun est devenu chef d’État, cette animosité chronique s’est muée en stratégie assumée de mise sous pression. L’arme n’a pas changé: elle vise à délégitimer, non à dialoguer, à réduire au silence, non à interroger.

Soyons lucides, et n’esquivons pas la vérité : GFM n’est pas un sanctuaire d’infaillibilité. Comme toute rédaction digne de ce nom, nous avons connu nos manquements, nos angles morts, nos silences, certains lourds, d’autres regrettables. L’affaire Tullow 01 relève de ces épisodes où notre responsabilité a été engagée. Nous l’avons reconnue, discutée, assumée.

Cette critique, oui, est légitime. Mais elle ne saurait être érigée en faute originelle ni servir d’argument perpétuel à notre disqualification. Répéter inlassablement cette séquence comme un totem expiatoire, en faire le pilier d’une entreprise de mise au ban, c’est céder à une paresse intellectuelle ou à une mémoire délibérément sélective. Ce n’est plus une critique: c’est une posture. Ce n’est plus une interpellation: c’est une diversion. Un procédé rhétorique dont l’objectif n’est pas la vérité, mais l’intimidation, et dont le ressort n’est pas l’éthique, mais la disqualification par culpabilisation.

Que Ousmane Sonko se le tienne pour dit, et qu’ille comprenne une bonne fois pour toutes : GFM ne boycottera pas Pastef. Pas plus que nous ne boycotterons l’APR, le FDR, l’opposition ou le pouvoir. Nos colonnes, nos antennes, nos plateformes resteront ouvertes à tous : à vos exploits comme à vos fautes, à vos victoires comme à vos égarements. C’est le prix et l’honneur, d’une presse libre. Une presse qui ouvre, qui interroge, qui résiste, parfois avec maladresse, mais jamais avec servilité. Parce que c’est cela, au fond, une presse libre : elle n’obéit à personne, sinon à sa conscience professionnelle. Elle ne parle ni sous la menace ni sous la commande. Elle creuse, elle révèle, elle dérange. Non par goût de l’affrontement, mais par éthique.

Le Groupe Futurs Médias est composé d’hommes et de femmes libres. Libres de penser, de douter, d’adhérer ou de s’opposer. Il s’y trouvera des journalistes et des techniciens qui voteront Pastef, d’autres qui ne le feront pas, et d’autres encore qui choisiront la «neutralité», en toute lucidité, parce qu’ils en ont le droit et l’exerceront, quoi qu’il vous en coûte. Pour mémoire, l’un des nôtres, feu Ibrahima Diakhaby, fut votre tout premier collaborateur en communication, peut-être même le premier à croire sincèrement que vos idées méritaient d’être portées et vulgarisées. Ce n’est pas un détail anodin, c’est un symbole fort.

Seule la mort a pu vous en séparer : il incarnait cette vérité profonde qui fait que, chez nous, on peut appartenir à une rédaction tout en assumant pleinement ses convictions, sans jamais compromettre sa dignité, son éthique ni le respect de la déontologie qui fait l’honneur de notre métier. Sans jamais renier son droit inaliénable à exister.

Les autres continueront de faire ce pourquoi ils sont là : chercher, interroger, questionner, éclairer. Non pas pour plaire, mais pour comprendre. Parce que, n’en déplaise, la démocratie n’est pas un alignement de têtes obéissantes. Elle est un désaccord vivant, un bruit de voix, un tumulte d’idées. Elle n’a rien d’une caserne. Rien d’un cénacle d’endoctrinement. Et certainement rien d’un comité de soutien. Nous ne sommes pas une filiale médiatique d’un parti, ni un bataillon de propagande, ni un instrument de validation. Nous sommes une rédaction.

Et dans une rédaction digne de ce nom, le pluralisme ne se tolère pas à titre gracieux, il se cultive comme un principe cardinal. Il ne se quémande pas, il s’exerce, avec la conviction de ceux qui savent qu’ils tiennent là l’un des derniers remparts contre l’uniformisation des esprits.

Quant à la liberté de conscience, Monsieur le Premier ministre, ce n’est ni un argument de campagne, ni un privilège consenti aux docilités. C’est un droit. Un droit inaliénable, imprescriptible, non négociable. Ce droit, vous n’avez pas à nous l’octroyer. Et vos anathèmes, vos exhortations au boycott, vos fureurs rhétoriques n’en viendront jamais à bout. Qu’il vous en souvienne, non pas comme une bravade, mais comme une promesse : ce droit est durable, irréversible, constitutionnel. Et nous le tiendrons debout.

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